Publié par Tyler Durden, le 7 juin 2015
En mai dernier, les directeurs généraux conjoints de la
Deutsche Bank, Anshu Jain et Jürgen Fitschen ont connu un réveil brutal.
Lors de la réunion annuelle, moins des deux-tiers des
actionnaires ont approuvé la performance de leurs cadres de direction. Ce qui
représente une baisse significative par rapport aux 90% de l’année précédente.
En cause : l’ambigüité entourant la réduction des coûts,
des objectifs de profits lointains et les préoccupations des investisseurs
concernant la culture d’entreprise de la banque.
La Deutsche Bank, encore plus que toute autre entreprise à
Wall Street, représente le stéréotype de la banque corrompue.
Les reproches faits à la banque et à ses employés vont de la
manipulation de taux d’intérêts jusqu’à la violation des sanctions américaines
contre l’Iran. Les poursuites accumulés
ont coûté à la banque près de 9 milliards de $ rien qu’au cours des trois
dernières années et ce chiffre pourrait encore augmenter selon des rapports
suggérant que le Département américain de la Justice pourrait arracher une
transaction pénale d’un montant de 2 à 3 milliards de $, rien que pour l’affaire
des titres adossés à des créances hypothécaires (Mortgage Back Securities) qui
a mal tourné, dans les prochains mois.
Les problèmes se situent bien au-delà de ces affaires qui
suscitent un grand intérêt du public. Le mois dernier, par exemple, la Deutsche
Bank a payé 55 millions de $ pour solder une enquête de la SEC (Commission
américaine sur les Opérations de Bourse) relative à des accusations selon
lesquelles la banque a délibérément dissimulé dans ses comptes des milliards de
pertes sur des produits dérivés liées à l’effondrement du marché canadien des
papiers commerciaux adossés à des actifs (ABCP) en 2007.
Extrait du rapport annuel de la Deutsche Bank :
Nous faisons
actuellement l’objet d’enquêtes de l’industrie financière, au niveau
réglementaire et pénal relatives à des taux interbancaires, ainsi que de
poursuites au niveau civil.
En raison d’un
certain nombre d’incertitudes, y compris celles liées à des questions à haut
niveau et à d’autres négociations en cours entre banques, l’issue de ces
questions est imprévisible, et pourrait se répercuter de manière concrète voire
négative sur notre résultat d’exploitation, notre situation financière et notre
réputation.
Un certain nombre
d’organes judiciaires au niveau mondial enquêtent sur nous en liaison avec des
fautes graves, d’ententes sur la
manipulation des taux de change sur le marché des devises. L’étendue de notre
activité financière sur ces marchés, pourrait se traduire dans la réalité, et
notre réputation pourrait également en pâtir.
Un certain nombre
d’organes judiciaires enquêtent actuellement ou recherchent des informations
relatives à nos relations avec la banque Monte dei Paschi di Siena. L’étendue
de nos transactions dans cette affaire pourrait se traduire dans la réalité, et
notre réputation pourrait également en pâtir.
Un certain nombre
d’organes judiciaires et de police aux Etats-Unis enquêtent pour savoir si
certains de nos règlements en dollars américains sur instructions de pays
faisant l’objet d’un embargo américain
étaient conformes aux lois fédérales et des états.
Nous avons fait
l’objet de plaintes contractuelles, de litiges et d’enquêtes gouvernementales
concernant nos contrats de prêts immobiliers hypothécaires aux Etats-Unis qui
pourraient affecter négativement notre résultat d’exploitation, notre situation
financière et notre réputation.
Vous voyez dans quel sens on va.
A présent, la frustration des actionnaires concernant les
performances de la banque et la nature apparemment inéluctable des problèmes
judiciaires de l’entreprise se sont traduites par la démission de Jain et
Fitschen. Wall Street Journal en a le récit :
Anshu Jain et Jürgen Fitschen, les deux directeurs généraux
conjoints de la Deutsche Bank AG, prévoient d’annoncer leur démission, selon
les habitués du dossier, une décision brutale qui pose la question de l’avenir
d’une des plus grandes banques mondiales.
M. Jain, un ancien trader et banquier d’affaires, envisage de
démissionner avec effet à fin juin, selon une personne. L’autre directeur
général, M. Fitschen, envisage de quitter la Deutsche Bank après la réunion
annuelle des actionnaires de mai prochain, selon la même source.
Cette double démission, qui pourrait être annoncée dès
dimanche, fait suite à une série de faux-pas financiers et d’amendes contractuelles
subis par le géant bancaire allemand, qui exerce ses activités de banque
d’affaires et de gestion de fonds dans le monde entier. Très récemment, la
banque a dû payer une amende de 2,5 milliards de $ et plaider coupable pour en
finir avec des accusations selon lesquelles ses traders avaient tenté de
manipuler les taux d’intérêts de base, y compris le taux interbancaire de
Londres, Libor. Certains gros actionnaires ont manifesté leur mécontentement
croissant à propos des résultats de la banque et des plans de la direction pour
renverser la tendance.
Pour ajouter à la tension, M. Fitschen est accusé dans un
procès pénal qui se déroule en Allemagne concernant l’effondrement de l’empire médiatique Kirch. M. Fitschen,
âgé de 66 ans, a nié les accusations portées à son encontre.
Les soudaines démissions ouvrent la possibilité à des
changements majeurs à la Deutsche Bank. En avril, MM. Jain et Fitschen ont reçu
le coup de grâce lors d’une révision stratégique destinée à simplifier les
pesanteurs de la banque et à en améliorer la profitabilité. Mais au grand
désappointement de certains actionnaires, ils n’ont pas appliqué le projet
radical de scinder les activités de la banque d’investissements et de la banque
de détails en deux sociétés distinctes.
On ne connaît pas la raison provoquant ces démissions
soudaines.
Un éclairage supplémentaire de la part de Reuters :
Le conseil
d’administration a convoqué une réunion extraordinaire ce dimanche pour
discuter de la gouvernance de la banque, selon la source. On s’attend à ce qu’il
désigne John Cryan, l’ancien directeur financier d’UBS, pour remplacer Jain,
selon un article du Financial Times britannique.
La Deutsche Bank a lutté pour restaurer une image ternie
par toute une série de problèmes réglementaires et judiciaires comprenant son
implication dans la manipulation des taux d’intérêts de base, la vente
irrégulière de produits dérivés, l’évasion fiscale et le blanchiment d’argent.
Dans une ultime
tentative de rétablir la confiance dans sa direction, la banque allemande a présenté
un plan de changement radical du management le 21 mai dernier, avec pour seul
résultat d’appeler à la démission de Jain de la part de sa propre équipe de
direction au siège de Francfort.
Certains investisseurs ont exigé davantage de changements pour
rétablir la confiance.
John Cryan, l’ancien directeur financier d’UBS, est
apparemment prêt à reprendre les rênes.
* * *
Avec Jain – l’ancien trader et de la banque d’investissement –
sur le chemin du départ à la fin du mois, l’inventaire des produits dérivés
(qui en notionnel se monte à 20 fois la valeur du PIB allemand) se retrouvera
sous la seule supervision de Fitschen, qui, comme nous le rappelle Reuters,
« est requis de se présenter chaque semaine devant un tribunal pénal à
Munich (Allemagne) pour se défendre des accusations d’avoir induit en erreur des
enquêteurs concernant le litige sur les héritiers de l’empire médiatique
Kirch. »
Le parallèle est étrange.
Crédit photo AFP – les Co-dirigeants de la Banque
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Traduction française Patrick T rev Isabelle
Deutsche Bank
Co-CEOs To Resign Amid Shareholder Frustration
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