« La victoire inattendue de Poutine : L’Europe est furieuse
car la Grèce mettra désormais son veto aux sanctions contre la
Russie » .
« Il y a deux jours, Zero Hedge d’abord, et peu de temps après tout
les autres, a fait remarquer quelque chose de
magnifique : la plus
grande surprise du nouveau gouvernement grec anti-Troïka / austérité n’a pas
tellement été son intention de procéder au 1er ‘test’ quant à « l’odieuse dette « – cela était largement connu à l’avance – mais son rôle
dramatique de pivot, loin de l’Allemagne et de l’Europe, et vers la Russie.
Comme nous l’avons noté précédemment, non seulement la Grèce a déjà
bloqué tous les processus de privatisation en cours, un camouflet clair
pour Merkel et la troïka qui exige la vente spéciale, fragmentaire, de la
Grèce pour les acheteurs occidentaux dans le cadre du « plan de
sauvetage » ; mais TSIPRAS prévoit également de réintégrer les employés du
secteur public et d’annoncer une augmentation des pensions pour les personnes à
faibles revenus : nouvelles violations claires des termes d’austérité de la
troïka.
Mais le message le plus important que Tsipras envoie à l’Europe, c’est
que (après avoir rencontré l’ambassadeur de Russie pour la première fois
pendant cette élection) , la Grèce mettra maintenant effectivement un
droit de veto lorsqu’il s’agira de futures sanctions russes !!
Cela a été évoqué lorsque le ministre des Affaires étrangères Nikos
Kotzias, qui arrive aujourd’hui à Bruxelles pour discuter de possibles
sanctions supplémentaires contre la Russie par rapport au conflit en Ukraine, a
déclaré il y a quelques jours que le gouvernement grec était en désaccord
avec une déclaration de l’UE dans lequel le président Donald Tusk a soulevé la
perspective de « mesures restrictives » quant à la Russie. Comme Bloomberg l’a observé , ces derniers mois, Kotzias a écrit sur Twitter que « les
sanctions contre la Russie n’étaient pas dans l’intérêt de la
Grèce ». Il a dit dans un blog qu’une nouvelle politique
étrangère de la Grèce devrait être axée sur l’arrêt de la transformation en
cours de l’UE « en un empire idiosyncrasique, sous la domination de l’Allemagne ».
Et l’Europe, est choquée que l’un des siens a osé remettre en question
sa politique «unanime» envers la Russie, une politique entraînée par le département
d’Etat de politique étrangère américain, dont l’opinion sur l’Europe est
la mieux exprimée par le message piraté
et intercepté « Fuck l’UE » de Victoria Nuland en Février 2014, qui avait été contrainte de
faire marche arrière. »
Zero Hedge conclu :
« En tout état de cause, l’équilibre des forces en Europe vient de
changer, et ce d’une manière que personne n’attendait.
Les grands gagnants, du moins pour le moment : la Grèce et la Russie
(et, bien qu’ils ne l’admettront jamais, tous ces Européens ont désespérément
besoin du marché d’importation russe).
Les plus grands perdants : tous les eurocrates non élus à Bruxelles, qui
en ce moment se grattent la tête pour savoir comment expliquer la mauvaise
nouvelle sur le fait qu’il n’y a désormais plus d’unanimité de l’Europe sur les
sanctions russes, à John Kerry, … et tout cela grâce à un pays dont personne,
ne pensait qu’il oserait parler. »
http://www.zerohedge.com/news/2015-01-29/putins-unexpected-victory-germany-furious-greece-now-russian-sanctions-veto – résistanceauthentique
La Grèce se tourne donc vers la Russie . Superbe affaire pour
Poutine, et je comprend que l’Europe soit furieuse : les répercussions
géopolitiques sont … incalculables !
C’est une onde de choc d’envergure planétaire qui vient d’être envoyée
par la plus ancienne « démocratie », du monde.
Voici des précisions :
Contre les sanctions de l’UE en Russie, contre le gouvernement
ukrainien, contre l’austérité, contre l’Allemagne: Alexis Tsipras n’a pas tardé
à démontrer la continuité idéologique de Syriza. Un nouvel axe se dessine:
Athènes-Moscou
Cela n’a pas échappé au quotidien économique russe Kommersant: le nouveau premier ministre grec, Alexis Tsipras, a, dès avant la
victoire de Syriza, annoncé qu’il était favorable à un allègement des
sanctions et contre la politique d’isolement de la Russie.
Et dans «les premières escarmouches» entre la nouvelle Grèce et l’Union
européenne racontées dans Le Temps ce jeudi matin, un aspect géostratégique frappe: l’axe
Athènes-Moscou qui est en train de se dessiner sur la carte des alliances. Ce
que la Neue Zürcher
Zeitung résume dans la
formule: «Le cheval de Troie de Poutine».
Résumons. A peine installé, le gouvernement de Syriza
passe l’acte: il récuse les nouvelles sanctions contre la Russie réclamées par
Bruxelles après la reprise de violentes hostilités dans l’est de l’Ukraine.
Pendant ce temps, Nikos Kotzias, le ministre des Affaires étrangères, transfuge
du Parti communiste grec, défend des relations bilatérales plus étroites avec
Moscou. Il aurait déjà remercié Poutine de s’être porté «au secours de nos
frères orthodoxes» en Crimée.
Dans la revue de presse de France Inter, on lit que la Frankfurter
Allgemeine Zeitung, qui titrait clairement mercredi «Nach Moskau! Nach Moskau!», s’en
inquiète, en évoquant «la joie du Kremlin depuis dimanche». Et toujours en
Allemagne, Bild enchaîne avec «Die
Russen-Connection der Griechen-Radikalos»: «A peine 90 minutes après
son investiture […], Tsipras rencontre qui? L’ambassadeur russe en Grèce»:
Le journal Kathimerini, qui a fait le tour
de quelques réactions russes, semble indiquer assez clairement qu’à Moscou la
presse juge que la Grèce «vient de donner une vraie leçon de démocratie au
reste de l’Union européenne».
Puis, dans le Guardian, une «tribune d’une
violence inouïe» vient à la rescousse de cette Grèce de Syriza que «l’Allemagne
cherche à étrangler dès sa naissance». Pour le quotidien britannique, Angela Merkel est «le
dirigeant politique le plus monstrueux de notre génération», «qui tyrannise le
reste de l’Europe». Le texte va jusqu’à se référer au Dictateur de Charlie Chaplin, avec ses
«hommes robots», ses «esprits robots» et ses «cœurs de robots». Plus étonnant
encore, le gouverneur de la banque d’Angleterre, Mark Carney, occupe la une du Times de Londres, en
se disant résolument «contre cette obstination allemande en matière d’austérité
qui empêche la croissance partout en Europe».
Le site Réseau
International évoque d’ailleurs des gestes hautement symboliques. Après avoir
déclaré que «nous ne devons ni accepter ni reconnaître le gouvernement des
néonazis en Ukraine», Tsipras a choisi de se rendre au champ de tir de
Kaisariani pour rendre hommage aux 200 militants politiques grecs qui y ont été
exécutés par les nazis le 1er mai 1944. «Des centaines de partisans, dont beaucoup étaient en
larmes, l’ont regardé s’approcher du site.» Et les commentateurs grecs n’ont pu
s’empêcher d’y voir «un nouveau «allez vous faire voir» à l’adresse des
Allemands»:
Et l’on ne parle même pas encore de Yanis Varoufakis,
le ministre des Finances de Tsipras, que Courrier
international trouve «rebelle, grandiloquent, iconoclaste». Il préfère «le
t-shirt et le jean au costume-cravate» et c’est lui qui va aller renégocier la
dette grecque à Bruxelles. «Bien différent de ses prédécesseurs, aux dires
du Financial
Times, l’homme […] s’est fait connaître pour les textes d’opinion sur la
crise financière» qu’il publie régulièrement sur son blog,
yanisvaroufakis.eu , où il se proclame «marxiste imprévisible», dit France Info dans le très
bon petit portrait qu’elle brosse de lui.
Cela, entre autres, lui a «fait gagner des milliers
d’abonnés» sur Twitter (@yanisvaroufakis) . Et il faut préciser,
loin de l’anecdote, que «Varoufakis est adepte de la théorie des jeux,
stratégie qui consiste à anticiper les réactions de son adversaire. Appliquée très
sérieusement en économie, cette théorie permet de modéliser des hypothèses
avant de prendre les bonnes décisions. Cela lui sera certainement d’un grand secours dans les
prochains mois.» Et ça rappelle la stratégie des grands joueurs d’échecs
russes.
Une «frontière malsaine»
Alors, un allié solide à Moscou ? Le site Breizh
Info l’explique très bien en indiquant «qu’interrogé par l’édition en
ligne du journal Rossijskaya Gazeta peu avant les
élections […], Kostas Sirixos, directeur du département des affaires étrangères
au sein de Syriza, précisait ainsi les orientations principales de la politique
étrangère de la Grèce en cas de victoire: un de nos objectifs «est de
travailler avec nos alliés politiques européens pour contrecarrer l’influence
géopolitique et économique que l’Allemagne essaie d’imposer aux pays d’Europe
du Sud-Est et aux Balkans.»
La radio La Voix de la
Russie renchérit: «Cette manie de vouloir conserver à tout prix une
frontière malsaine, rigide et j’oserais employer ce terme désuet d’impérialiste
entre un Nord-créditeurs et un Sud-débiteurs devant sempiternellement se serrer
la ceinture perdra un jour l’Allemagne. […] La Grèce étant le berceau de notre
civilisation, on ne saurait s’attendre à ce qu’elle obtempère plus longtemps
aux desiderata d’une Europe à deux vitesses dans laquelle une poignée d’ethnies
élues s’arroge le droit d’imposer aux périphéries un mode de fonctionnement
parasitaire.» Le politicien Panagiotis Lafazanis, sur Mediapart, ne dit d’ailleurs pas autre chose.
Contre l’euro-atlantisme
Interrogé par L’Agefi, Yorgos Tsipras, coordinateur du département de
politique étrangère de Syriza et cousin germain d’Alexis Tsipras, est encore
plus direct: «Nous sommes à l’épicentre de deux zones conflictuelles: au nord,
il y a l’Ukraine et au sud-est la Syrie. On veut davantage de relations avec la Russie, qui
doivent s’inscrire dans une politique multidimensionnelle. On ne veut plus
d’une politique d’alignement euro-atlantique. Les sanctions contre la Russie
ont fait perdre beaucoup d’argent à la Grèce qui n’y a rien gagné.»
«La Russie est un grand pays ayant du potentiel, une
histoire et une immense expérience. Y compris pour sortir des crises. L’Europe
est impensable sans une Russie qui y occuperait une place appropriée», disait
Tsipras à la presse russe lue par RIA Novosti il y a quelques
jours. Le magazine hebdomadaire Ogoniok a notamment
rebondi sur un article du Spiegel allemand, en demandant au
premier ministre: «Pourquoi êtes-vous plus dangereux pour l’UE que, par
exemple, le Front national, les Vrais Finlandais ou la Ligue du Nord italienne
?»
Les nationalistes, «faux ennemis»
Réponse d’Athènes: «Parce que Der Spiegel a
tout compris. Les partis nationalistes sont de faux ennemis du système en
place. Ils sont précisément un produit de la politique libérale de l’Europe,
même s’ils menacent aujourd’hui de la détruire. Le parti (profasciste) grec Aube dorée est passé de 0,3 à
7% pendant les années de politique d’austérité. Contrairement aux partis de ce
genre, nous ne proposons pas de quitter l’Europe ou la zone euro.» Mais Tsipras
fustige «ceux qui ont imposé à l’Europe un modèle antidémocratique et
antiéconomique. Quoi qu’en disent les 28 pays membres de l’UE, c’est la fameuse
«troïka» (CE, BCE, FMI) qui prend des décisions et agit dans l’intérêt des
banques, et non du développement économique dans l’ensemble.»
«Ce qui a été fait avec la Grèce devrait même entrer dans
les manuels d’économie en tant que contre-exemple», ajoute-t-il. C’est peu dire
que le débat est lancé, et qu’il s’annonce musclé ces prochains mois.
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