Middle East
Politics
ISRAËL BOMBARDE LA SYRIE : ÇA VA DURER
ENCORE LONGTEMPS?
Posted
on 27/02/2020 by Elijah J Magnier
Par Elijah J. Magnier: @ejmalrai
Traduction : Daniel G.
Pour le président syrien Bachar al-Assad et la
Russie, la guerre contre le terrorisme l’emporte sur les provocations israéliennes.
La Syrie et la Russie évitent par nécessité une « bataille entre deux
guerres », un terme utilisé par Israël pour se faufiler et lancer un raid
contre une cible ennemie pas suffisamment importante pour déclencher une guerre
généralisée. L’élimination des djihadistes sur le front d’Alep et d’Idlib est
beaucoup plus importante pour la Syrie qu’une riposte aux attaques israéliennes
contre la capacité militaire de l’armée syrienne et sa destruction d’entrepôts
militaires. Le commandement militaire israélien sait quelles sont les priorités
syriennes et tire avantage de la situation. Israël a lancé des centaines
d’attaques en Syrie contre des cibles variées dans différentes villes
syriennes, sans toutefois changer l’équilibre des forces et des capacités
militaires. Mais il sera facile de
stopper les arrogantes violations de la souveraineté syrienne par Israël quand
Damas sera prêt à tourner ses armes contre lui.
En fait, malgré plus de 400 attaques israéliennes
sur la Syrie depuis le début de la guerre en 2011, l’armée syrienne a libéré
aujourd’hui la majeure partie de la Syrie, à l’exception du nord occupé par les
forces turques et américaines. L’armée syrienne avance vers le nord, en frappant
aux portes d’Idlib depuis un mois. Les attaques israéliennes n’ont pas miné la
confiance de l’armée syrienne, qui a fait ses preuves dans des batailles
acharnées dans la Ghouta (à l’est de Damas), à Deir-Ezzor (nord-est) et dans le
nord, et qui vient de dégager un grand périmètre de sécurité autour d’Alep.
La doctrine des Forces de défense israéliennes
consiste à se spécialiser dans l’étude des affaires militaires plutôt qu’à se
fier à l’expérience sur
le terrain. L’Iran et ses alliés comptent énormément sur l’expérience,
l’enseignement, l’entraînement et le renouvellement de leur doctrine militaire
de façon créative.
D’une
bataille à l’autre, l’armée syrienne acquiert une expérience au combat qui lui
réussit, une supériorité évidente sur le champ de bataille, une puissance de
feu intense pour dégager la voie à l’infanterie avant toute attaque, une
planification militaire efficiente, de l’équipement militaire perfectionné et
une excellente capacité de coordination avec ses partenaires et l’armée russe.
L’armée syrienne et ses alliés ont défait Daech dans la majeure partie de la
Syrie. Les USA n’ont contribué à défaire Daech qu’au
nord-est, en ne permettant pas aux forces de Damas de traverser
l’Euphrate.
L’armée syrienne a également défait al-Qaeda, ses
combattants pour la plupart étrangers idéologiquement motivés et
particulièrement bien entraînés et équipés, ainsi que tous les autres groupes
djihadistes qui combattent sous différents noms, aux côtés de Syriens locaux
(Hayat Tahrir al-Sham, Ansar al-Sharia, Ahrar al-Sham etc.). Les forces US
n’ont pas livré bataille à al-Qaeda et d’autres groupes djihadistes en Syrie,
en se limitant à des assassinats ciblés au moyen de drones. C’est l’armée syrienne
et ses alliés qui ont fait le boulot d’éliminer al-Qaeda et ses alliés
djihadistes en Syrie.
Israël n’a jamais combattu dans des guerres
prolongées, contrairement à la Syrie, à l’Iran et au Hezbollah qui ont vécu des
années de guerre en étant confrontés à toutes sortes d’ennemis employant
diverses tactiques. La Syrie, l’Iran et leurs alliés ont combattu en terrain
montagneux, dans des zones dégagées, en milieu urbain et dans le cadre
d’opérations spéciales derrière les lignes ennemies en affrontant plus d’un
ennemi à la fois. Cette expérience est inestimable et unique.
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L’Iran a livré à la Syrie des missiles balistiques
et de croisière, ainsi que la technologie nécessaire pour en fabriquer
localement. Israël croit avoir détruit bon nombre de ces missiles de précision,
ce qui est probable. Mais Israël n’a pas réussi à priver la Syrie de tous ses
missiles de précision, en ne faisant que détruire des missiles et des drones
armés remplaçables.
La doctrine militaire israélienne s’appuie
principalement sur une force aérienne qui a fait preuve de son efficacité
limitée lors de la dernière guerre israélienne au Liban en 2006. Mais cette
force aérienne peut être facilement contrée. Selon une source de haut rang au
sein de l’Axe de la Résistance, une simple règle d’engagement peut immobiliser
pour de bon l’armée de l’air israélienne. La Syrie et ses alliés répondront en
temps et lieu à chaque attaque aérienne israélienne par des tirs de missiles
balistiques et de croisière munis de têtes explosives, juste assez pour
intimider Israël et établir un équilibre entre une attaque aérienne et le
lancement de missiles.
Le major général (à la retraite) Amos Yaldin, qui
dirige l’Institut des études pour la sécurité nationale, a indiqué dans son
évaluation annuelle que la probabilité
de guerre augmente. Pour sa part, l’Axe de la Résistance croit
que la guerre est peu probable parce que toutes les parties sont fortement
armées et peuvent causer d’immenses dommages de part et d’autre. Israël est
fragile sur le plan intérieur et n’est pas habitué aux bombardements de
missiles balistiques contenant plus de 700 kg de charge explosive et de
missiles de croisière capables de frapper avec précision de multiples cibles
sélectionnées. Les missiles de précision peuvent réduire les pertes civiles
lorsqu’ils sont lancés contre des cibles militaires, mais ils peuvent aussi
viser des objectifs très sensibles s’il le faut. Israël n’est plus tout seul
à pouvoir causer des dommages aux pays voisins. Pour le moment, Israël tire
avantage de la concentration des efforts militaires syriens contre les
djihadistes en bombardant la Syrie sans vraiment subir de représailles. Mais une fois le nord de la Syrie libéré, l’heure
des représailles sera venue pour la Syrie.
La présence russe au Levant va sûrement bloquer
toute possibilité qu’un conflit se transforme en guerre majeure dans la région.
Le président Poutine n’est pas le président Dimitry Medvedev qui, en 2011, a
donné à l’OTAN carte blanche pour détruire la Libye. Israël et la Russie ont de
bonnes relations, mais la Russie ne tolérera pas qu’une guerre israélo-syrienne
vienne gâcher ses plans d’imposer la stabilité dans la région.
La Russie a déjà fait les frais d’attaques
israéliennes et a tenu Tel-Aviv responsable de la destruction de son Ilyushin
IL-20 avec 15 officiers à bord en septembre
2018. En réponse, la Russie a fourni à la Syrie des missiles S-300. En
outre, des rapports récents indiquent que des Su-35 russes auraient poursuivi un
avion israélien en le forçant à quitter l’espace aérien syrien.
Israël
et la Russie sont parvenus à un accord en vertu duquel tout avion israélien
violant l’espace aérien syrien pourrait se faire abattre. La Russie a le contrôle de tout l’espace aérien
au-dessus de la Syrie, sauf à l’est de l’Euphrate. C’est ce qui explique
pourquoi Israël a violé l’espace aérien irakien en bombardant des cibles (base
militaire d’Althiyas,
appelée aussi T4) à l’est de Homs sous le couvert des bases militaires US en
Irak et dans le nord-est occupé de la Syrie. Israël bombarde aussi des cibles
en Syrie à partir des hauteurs du Golan occupé ou du Liban. La Russie demande
aussi à Israël de l’informer à l’avance de toute attaque pour lui permettre
d’éviter d’être pris dans un tir croisé, d’avertir ses partenaires pour réduire
les pertes et de retirer les armes sensibles de leurs caches.
L’Iran
arme continuellement la Syrie et ses alliés au Levant. Israël en est conscient
et ne peut faire grand-chose pour y mettre fin. Israël sait aussi que ses attaques contre la Syrie cesseront lorsque la
Syrie aura libéré son territoire. Il vaudrait mieux pour Israël de mettre fin à
son spectacle électoral et au bombardement de cibles non stratégiques. La
présence iranienne en Syrie est un fait accompli que ni les USA, ni la Russie,
ni Israël ne peuvent changer. La Syrie a besoin d’un pays comme l’Iran pour
s’élever contre l’hégémonie américaine et défendre le pays quand il le faut.
Plus de neuf années de guerre ont permis à l’Iran d’établir une relation
profonde avec la Syrie et de démontrer qu’il était prêt à s’élever contre les
USA s’il le fallait, comme l’attaque de la base militaire US à Ayn al-Assad l’a
prouvé. Un jour viendra où Israël ne pourra plus utiliser ses forces aériennes,
maritimes et terrestres librement contre la Syrie. Les missiles de précision
ont changé l’équilibre du pouvoir et imposent de nouvelles règles d’engagement
radicalement différentes.
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